CONNECTED n°19
Que le spectacle commence!

À 150 ans, l'opéra de Paris s'équipe pour le streaming

interieur opera garnier

Multiséculaires, les performances lyriques, chorégraphiques, théâtrales ou musicales résistent aux bien plus jeunes films de cinéma, séries TV et jeux vidéo. Un nombre grandissant d’institutions culturelles s’équipent d’installations de broadcast dernier cri pour encore améliorer leur offre, mieux maîtriser leur diffusion et même créer leurs contenus. Leader des solutions broadcast UHD, le Groupe LEMO accompagne cette modernisation et s’invite dans les plus prestigieuses salles. Il se glisse même parfois dans le costume des acteurs.t.

Avec son opulente façade aux trente colonnes et ses dômes verts, le Palais Garnier est l’un des joyaux architecturaux de Paris. Inauguré il y a près de 150 ans, il est en train d’être ancré un peu plus dans le troisième millénaire par des kilomètres de fibre optique. En début d’année, son frère cadet de l’Opéra Bastille (1989) a lui aussi été équipé d’un réseau tout neuf.

À la tête des deux prestigieux sites, l’Opéra national de Paris, une institution publique sous la tutelle du ministère français de la Culture. Son rôle : développer l’art lyrique et chorégraphique, notamment en favorisant la création d’œuvres contemporaines et en formant chan- teurs et danseurs.

Le partage des opéras et ballets avec le plus grand nombre fait partie du cahier des charges. Depuis plus de 30 ans, celui-ci passe aussi par la télédiffusion, et les deux sites sont équipés d’un sys- tème de broadcast (maillage de câbles, régies…). Les partenaires
— en tête France Télévision et les prestataires intervenant pour la chaîne culturelle européenne Arte — y connectent leurs équipe- ments. Malheureusement, les diffuseurs sont passés à la TVHD, et cela fait déjà plusieurs années que le vieux système triax cuivre des deux opéras n’est plus compatible avec leurs caméras.

Puis, en 2020, une certaine pandémie s’est abattue. Le choc a accé- léré l’évolution de l’institution.

Du jour au lendemain, les spectateurs ont été interdits de salles. Comment leur permettre d’admirer, malgré tout, opéras et ballets ?
« Nous avons très rapidement passé un accord avec nos partenaires pour offrir, sur leurs plateformes, une rediffusion par semaine », raconte  Laurent  Métivier,  chef du  Service  audiovisuel  de  l’Opéra national de Paris. On crée surtout, en quelques mois seulement, un service payant de vidéos à la demande. « Opéra chez soi» offre des spectacles enregistrés, mais pas seulement. En décembre 2020, La Bayardère, filmée dans une salle vide, est le premier spectacle diffusé en direct sur cette nouvelle plateforme. « Un grand succès, puisque plus de 10000 billets ont été vendus ! » D’autres diffusions en direct suivent.

L’Opéra national de Paris, dont les racines remontent au 17e siècle, est entré dans l’ère du streaming.
 

exterior opera garnier

Il n’est pas le premier: la Royal Opera House de Londres, le Teatro Real de Madrid, le Teatro San Carlo de Naples et d’autres ont lancé des offres similaires. Pas étonnant, car les avantages sont multi- ples, explique Laurent Métivier. « Nous sommes désormais moins dépendants de nos diffuseurs. C’est d’autant plus important que les chaines publiques tendent à réduire leur offre d’opéras et ballets. Le service nous permet également de tisser un lien direct avec nos publics. »

L’audience est aussi potentiellement plus large que jamais. Les spec- tacles au Palais Garnier et à l’Opéra Bastille affichent salle comble (plus de 90% de taux de remplissage), mais leurs spectateurs sont en grande majorité des Parisiens et habitants de la région parisienne. Et les spectateurs étrangers (principalement américains et japonais) sont moins nombreux depuis la pandémie. À l’inverse, l’audience du service en ligne est nationale et même internationale (respective- ment 70% et 30% pour « Opéra chez soi »).

Convaincu, l’Opéra de Paris a décidé de renforcer encore son offre. Fin mars dernier, il a remplacé « Opéra chez soi» par « Paris Opera Play» (POP), un service au contenu enrichi et à l’interface améliorée. Le « pay per view» n’est conservé que pour les spectacles en direct et différentes formules d’abonnement sont désormais proposées, source de revenus bienvenus et plus réguliers.

Pour mieux accompagner le nouveau service, la direction décide d’enterrer les désuets systèmes de broadcast. Place à la haute définition.

À l’Opéra Bastille, les travaux ont duré de novembre 2022 à avril 2023. Avec ses 2745 places assises dans la salle principale (et un second amphithéâtre de 500 places), il est l’un des plus grands du monde. Trois kilomètres de câbles fibre optique (Northwire SMPTE 311) ont été tirés pour remplacer le réseau triax cuivré. Reliant (avec connectique LEMO) les huit nouvelles petites caméras « pan-tilt- zoom» Panasonic (dont la moitié mobiles) pour la captation légère, les caméras TV (celles des chaînes ou celles que loue l’Opéra de Paris) pour la captation broadcast, les serveurs AVID, la régie, etc.
 

Dans le vénérable Palais Garnier, une mise à jour similaire a été lancée mi-avril. Les travaux devraient y être terminés cet été.

La saison 2023-2024 de l’Opéra de Paris propose 19 opéras (dont sept créations), 12 ballets (cinq créations) et un gala lyrique. S’il n’y avait que la télévision, les publics pourraient regarder chez eux une demi-douzaine de spectacles seulement. « Grâce au nouveau sys- tème de broadcast et à POP», souligne Laurent Métivier, « nous en proposerons une vingtaine. » Un gros effort est mis sur les directs, toujours plus demandés et bien plus regardés que les œuvres au catalogue. L’institution propose aussi d’autres contenus exclusifs, dont des « master class» et des documentaires.

Créer ses propres contenus implique l’intégration de nouveaux savoir-faire.  Là  encore,  l’Opéra  de  Paris  s’adapte,  s’appuyant  au maximum sur ses propres collaborateurs (cadreurs, techniciens…) et engageant au besoin des réalisateurs et techniciens externes.

L’offre  de  POP s’ajoute,  « de  manière  parfaitement  complémen- taire », à celles des prestations sur sites, des spectacles hors les murs, des projections en cinéma et des télédiffusions.

La prochaine étape ? « Nous aimerions être intégrés directement chez les grands diffuseurs de contenus tels qu’Orange, Amazon… » Sous la forme d’une application, qui pourrait aussi se glisser dans les interfaces des « smart TV».

Des œuvres lyriques et chorégraphiques toujours plus accessibles, c’est bien la mission de l’Opéra national de Paris. Nés il y a plusieurs siècles, bel canto et entrechats n’ont pas fini de faire vibrer les pas- sionnés. ■

Pour voir opéras et ballets : play.operadeparis.fr